MUNICIPALES #13 :

Contenu sponsorisé sur les réseaux sociaux et référencement commercial du site du candidat

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· Droit électoral

Peut-on avoir recours à un référencement commercial du site internet du candidat ?

Non, le référencement d’un site à finalité électorale pourrait être considéré comme un procédé de publicité commerciale interdit par le 1er alinéa de l’article L52-1 du code électoral.

Le Conseil d’État a eu l’occasion de se prononcer sur un tel procédé :

« Considérant, d’une part, que la réalisation et l’utilisation d’un site internet par la liste conduite par M. W ont le caractère d’une forme de propagande électorale par voie de communication audiovisuelle pour l’application de l’article L. 52-1 du code électoral ; que, d’autre part, dès lors que le référencement commercial d’un site à finalité électorale sur un moteur de recherche sur internet a pour finalité d’attirer vers lui des internautes qui effectuent des recherches, même dépourvues de tout lien avec les élections municipales, ce référencement revêt le caractère d’un procédé de publicité commerciale, interdit par l’article L. 52-1 du code électoral ; que l’irrégularité ainsi commise a été, compte tenu de la très faible majorité qui a permis l’élection de la liste conduite par M. W au premier tour de scrutin, de nature à fausser les résultats du scrutin ; »

Conseil d’État, 3e et 8e ss-sect. réunies, 13 févr. 2009, n° 317637, Lebon T.

« 11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'un référencement commercial de site intitulé " christianjeanjean.fr " a été acheté auprès de la société Google Adword, permettant à ce site d'apparaître en tête de la première page de résultats du moteur de recherche Google pour certaines recherches ; qu'un lien vers ce site apparaît également comme annonce publicitaire sur le réseau social Facebook ; que le référencement de ce site à finalité électorale dans des conditions permettant d'attirer vers lui des internautes effectuant des recherches mêmes dépourvues de lien avec les élections municipales contestées revêt le caractère d'un procédé de publicité commerciale interdit par le premier alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral ; que si M. C...soutient que la liste " Tous pour Palavas " aurait procédé à des abus de propagande équivalents, il ne résulte pas de l'instruction que celle-ci aurait, en tout état de cause, utilisé des procédés commerciaux du même ordre ;

12. Considérant que les manquements à l'article L. 52-1 du code électoral mentionnées ci-dessus ont été, compte tenu de l'écart d'une seule voix séparant, comme indiqué au point 8 ci-dessus, les deux listes arrivées en tête, de nature à altérer la sincérité du scrutin ; que, dès lors, M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les opérations électorales des 23 et 30 mars 2014 dans la commune de Palavas-les-Flots ; »

Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 25 février 2015, n°382904

Pour mémoire, l’article L52-1 du code électoral dispose que :

« Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite.

A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre. »

Le juge continue néanmoins d’apprécier les circonstances de l’espèce pour déterminer si les manquements à l’article L52-1 du code électoral ont été de nature à altérer la sincérité du scrutin. Il prend ainsi en compte l’écart séparant les deux listes arrivées en tête ou encore les modalités d’accès du site internet commercialement référencé.

Le TA de Toulon a ainsi jugé que le référencement d’un site par l’achat de liens sponsorisés sur Facebook accessible uniquement par les internautes visitant la page Facebook du candidat ne pouvait être « regardé comme revêtant le caractère d’un procédé de publicité commerciale, interdit par l’article L52-1 du code électoral » (TA Toulon, 17 oct. 2014, n° 1401277).

Peut-on avoir recours à des publications sponsorisées sur les réseaux sociaux ?

Non. Là encore, une telle pratique pourrait être considérée comme un procédé de publicité commerciale interdit par le 1er alinéa de l'article L52-1 du code électoral.

Pour autant, le juge prend en compte :

  • le contenu de la publication ;
  • son caractère polémique ou non (Conseil d'État, 6ème chambre, 28 mai 2021, n°445567)
  • l’impact de la publication sur la fréquentation de la page (Conseil d'État, 6ème chambre, 28 mai 2021, n°445567)
  • la réitération de l’utilisation du procédé commercial ;
  • le degré de précisions apporté par les protestataires (TA Melun, 25 févr. 2021, n° 2005159).

« 12. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction que si l’une des publications postées sur le réseau social « Facebook » par la liste « Poursuivre la dynamique pour Tramolé » était « sponsorisée », ce qui lui permettait, moyennant une modeste contribution de son auteur, d’être diffusée auprès d’un public dépassant les seuls abonnés de la page de cette liste, le contenu de cette publication n’excédait pas la simple présentation des travaux effectués durant le mandat de la municipalité sortante et il n’est, par ailleurs, pas allégué que l’utilisation de ce procédé aurait été réitérée. Dans ces conditions, cette publication ne saurait être regardée comme intervenue en méconnaissance des dispositions de l’article L. 52-1 du code électoral citées au point 4. »

CE, 8e chs, 9 juil. 2021, n° 445767

Cependant, il résulte de l'instruction que, compte tenu du caractère non polémique de son contenu et du faible impact de cette publication sponsorisée sur la fréquentation de la page Facebook du candidat, cette irrégularité n'est pas susceptible à elle seule, d'avoir altéré la sincérité du scrutin.

Notons que pour prouver la méconnaissance de l’article L52-1 du code électoral, une copie d’écran non datée ne peut suffire (CE, 5e chs, 15 déc. 2021, n° 448354). De même, il ne suffit pas de prouver qu’une publication aurait « un nombre de vues nettement plus élevé que celui constaté pour les précédentes publications effectuées » sur la même page Facebook pour démontrer que le contenu a été sponsorisé (CE, 3ème chambre, 13 juillet 2021, n°445434).

En conclusion : il est préférable de renoncer à toute forme de contenu sponsorisé et de miser sur un référencement naturel. En effet, même si après appréciation des circonstances de l'espèce, le juge électoral ne retient pas la méconnaissance de l’article L52-1 du code électoral, le recours aux contenus sponsorisés donne du grain à moudre à votre adversaire et pourrait l’inciter à former une protestation électorale. De plus, dans la mesure où vous ne pouvez anticiper, ni l’appréciation du juge, ni l’écart de voix entre les deux listes (qui rappelons-le est déterminant), un strict respect des règles du code électoral vous protège d’une éventuelle annulation !

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