MUNICIPALES 2026 #12 : Droit de vote en prison, un détenu a-t-il le droit de voter ?

Candidats aux élections municipales de mars 2026 ? Retrouvez chaque mercredi un article de droit électoral en vue du prochain scrutin. Article rédigé par Mathilde Haas, avocat en droit électoral.

Un détenu a-t-il le droit de voter ?

Oui, s’il n’est pas privé de ses droits civiques. Un détenu peut voter :

  • par correspondance
  • par procuration
  • en obtenant une autorisation de sortie pour aller voter

D’ailleurs, le code pénitentiaire prévoit que le chef de l’établissement informe les personnes détenues, dans les quinze jours suivant leur incarcération, des modalités de leur inscription sur les listes et d’exercice du droit de vote (article R361-1 du code pénitentiaire).

Où les personnes détenues qui souhaitent voter sont-elles normalement inscrites ?

Elles « sont inscrites sur la liste électorale de la commune de leur domicile ou de leur dernière résidence, à condition que cette résidence ait été de six mois au moins » (article L12-1 du code électoral).

Elles peuvent également être inscrites, par dérogation et pour faciliter les procurations, sur la liste électorale de :

  • leur commune de naissance ;
  • la commune où est né, est inscrit ou a été inscrit un de leurs ascendants ;
  • la commune où est inscrit leur conjoint, leur partenaire de pacte civil de solidarité ou leur concubin ;
  • la commune où a été inscrit un de leurs parents jusqu'au quatrième degré.

Quelles sont les modifications apportées par la proposition de loi adoptée le 4 juin 2025 ?

La proposition de loi adoptée le 4 juin 2025 (109 voix contre 60) vient néanmoins modifier les modalités de vote par correspondance en fonction du type d’élections.

Auparavant, dans l’hypothèse où les personnes détenues souhaitaient voter par correspondance, elles étaient, en application du III de l’article L12-1 du code électoral, inscrites dans la commune chef-lieu du département ou dans la collectivité d’implantation de l’établissement pénitentiaire.

Désormais, le vote par correspondance n’est possible que "lorsque la République forme une circonscription unique ou pour les opérations référendaires". Concrètement, cela veut dire qu’il n’est plus possible aux personnes détenues de voter par correspondance pour les élections locales, notamment municipales.

Pourquoi un tel changement ? Quel était le problème ?

Il était craint que la population carcérale puisse jouer sur la sincérité du scrutin, tous les prisonniers étant inscrits au même endroit comme en témoigne les anciennes dispositions de l’article L12-1 du code électoral :

« III.-Dans l'hypothèse où elles souhaitent voter par correspondance selon les dispositions de l'article L. 79, elles sont inscrites dans la commune chef-lieu du département ou de la collectivité d'implantation de l'établissement pénitentiaire, dans un bureau de vote correspondant à la circonscription ou au secteur qui comporte le plus d'électeurs inscrits sur les listes électorales. »

Or, certaines élections se jouent à quelques voix près, leur participation aurait ainsi pu faire basculer les résultats du scrutin.

L’exposé des motifs mettait également en exergue « la nécessité d'établir un lien de proximité effectif avec la commune dans laquelle la personne détenue a élu domicile ou celle dans laquelle résident les membres de sa famille, ascendants ou descendants » ainsi qu’une « plus grande cohérence dans la participation des personnes détenues à la vie démocratique locale et nationale ».

Comment se passe le vote par correspondance en pratique ?

L’article L79 du code électoral décrit les modalités de vote par correspondance :

« Les personnes inscrites sur la liste électorale au titre du III de l'article L. 12-1 votent par correspondance sous pli fermé dans des conditions permettant de respecter le caractère secret et personnel du vote, le cas échéant après passage par l'isoloir, ainsi que la sincérité du scrutin.
Les plis de vote par correspondance sont remis au président du bureau de vote le jour du scrutin et jusqu'à la fermeture du bureau de vote. Le président ou tout membre du bureau de vote qu'il désigne à cet effet ouvre chaque pli et, après avoir émargé en lieu et place de l'électeur, met aussitôt dans l'urne l'enveloppe contenant le bulletin ».

Une personne incarcérée peut-elle être autorisée à sortir pour exercer son droit de vote ?

Oui mais sous conditions !

L’article D363-1 du code pénitentiaire prévoit que « conformément aux dispositions de l'article D. 143-4 du code de procédure pénale, les personnes condamnées peuvent bénéficier d'une permission de sortir pour exercer leur droit de vote. »

En pratique, seules peuvent être autorisées à sortir (article D143-4 du code pénitentiaire) :

  • les personnes condamnées à moins de 5 ans de prison
  • les personnes condamnées à plus de 5 ans de prison lorsqu’elles ont exécuté la moitié de leur peine.
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